Le président des Etats-Unis est très paradoxal : s’il a réussi à passer une réforme de la santé, son sens du compromis l’a poussé très loin, sur la réforme de la finance, ou l’accord budgétaire de cet été. Mais la semaine dernière, il vient de proposer une mesure plus radicale pour soutenir l’emploi.
Le paradoxe étasunien
Le monde économique ne tourne décidemment pas rond. De notre côté de l’Atlantique, alors que le déficit moyen de la zone euro tourne autour de 6% du PIB, nous ne nous préoccupons que du niveau des déficits et de la réduction de la dette. Même la gauche promet d’inscrire dans la Constitution une camisole budgétaire une fois élue. Evoquer des dépenses supplémentaires provoque une tempête, comme l’ont expérimenté les candidats socialistes récemment.
Mais de l’autre côté des Etats-Unis, avec un déficit 50% plus important, une dette encore plus vertigineuse, voilà que le président de la République, si populaire dans toute l’Europe, loin de proposer un plan d’austérité à ses concitoyens, décide de proposer un plan de relance ! C’est qu’aux Etats-Unis, on ne regarde pas les indicateurs économiques de la même manière. Là-bas, c’est le chômage qui doit être l’objectif politique prioritaire aujourd’hui, du fait de sa persistance.
Alors que la BCE combat un fantôme d’inflation, Washington juge insupportable que le taux de chômage demeure au-delà de 9% pendant plus de 3 ans. Quelle ironie de l’histoire… Il a pour la première fois atteint ce cap il y a 25 ans en France et n’est pas descendu sous les 8% depuis (et encore, si on en prend une définition très restrictive). Ce « Munich social », cette apathie vis-à-vis du chômage de masse, le cancer de notre société, est aussi incompréhensible que révoltant.
Un plan en demi-teinte
Comme l’a très bien rapporté Yann, ce plan est loin d’être parfait. Il comporte quatre volets: le maintien des allocations chômage pour les allocataires de longue durée, des aides pour les Etats qui sont également en déficit pour éviter les coupes sombres, une baisse des charges et des mécanismes pour favoriser les embauches et enfin un programme d’investissements dans les infrastructures et les autoroutes. Mais surtout, le plan atteint la bagatelle de plus de 400 milliards de dollars !
En effet, alors que notre petit président qualifiait son emprunt de grand, il est largement toisé par le seul plan emploi de Barack Obama qui n’est pourtant qu’un mécanisme de plus dans le soutien à l’activité. Alors bien sûr, on pourra souligner que ce plan est en partie un pis aller. En effet, il ignore en grande partie les raisons structurelles de l’affaiblissement économique des Etats-Unis, son affaiblissement productif, qui a été camouflé par une bulle de crédit qui a soutenu la croissance.
Malgré tout, même s’il est imparfait, il vaut mieux que rien, même si les néolibéraux vont le combattre avec la plus grande détermination. Hervé Nathan souligne justement que « l’Amérique soutient l’emploi, l’Europe ses débiteurs », un moyen de souligner à quel point le débat public en France est bizarre avec la victoire médiatique des défenseurs d’une austérité stricte et le refus d’évoquer des voies alternatives comme pourtant les Etats-Unis l’expérimentent aujourd’hui.
Cette fois-ci, ne boudons pas trop notre plaisir. Malgré ses imperfections, ce plan est sans doute une assez bonne réponse à la situation économique actuelle. Alors souhaitons du courage à Barack Obama qui va sans doute affronter une opposition musclée des républicains.
Laurent Pinsolle
http://gaulliste-villepiniste.hautetfort.com/